Alors que près de 9 millions de personnes ont eu recours à ces molécules en 2024, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) lance un signal d’alarme ce jeudi 10 avril : les durées de traitement dépassent largement les recommandations médicales.
En France, l’usage massif des benzodiazépines — médicaments destinés à traiter l’anxiété et les troubles du sommeil — est en train de devenir un casse-tête sanitaire. Ce qui devait rester des traitements ponctuels s’est transformé, pour des millions de Français, en une consommation chronique, souvent risquée.
Un traitement court… qui s’éternise
Les règles sont pourtant connues : un traitement par benzodiazépines doit durer moins de trois mois en cas d’anxiété et moins de trois semaines pour l’insomnie. Mais la réalité est tout autre. En France, 3,6 millions de patients continuent d’en consommer bien au-delà de ces limites.
Comme le souligne Catherine Paugam-Burtz, directrice générale de l’ANSM : « Moins de trois Français sur cinq savent que ces médicaments doivent être pris sur des durées courtes, soit moins de trois mois dans le traitement de l’anxiété et moins de trois semaines dans le traitement de l’insomnie ».
Les seniors, principaux concernés, mais pas seulement
Si les plus de 65 ans restent les plus gros consommateurs de benzodiazépines, un phénomène préoccupant touche aussi les jeunes adultes, en particulier les femmes âgées de 18 à 25 ans. Cette population, bien que globalement moins consommatrice, voit ses usages progresser.
L’ANSM adapte donc sa stratégie :
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Pour les jeunes : des vidéos sur Instagram et TikTok mettant en avant des solutions non médicamenteuses comme l’activité physique ou l’accompagnement psychologique.
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Pour les seniors : des campagnes de sensibilisation sur Facebook, dans la presse locale et dans les taxis.
Les généralistes au cœur du dispositif
Impossible de faire évoluer les pratiques sans impliquer les professionnels de santé. En France, 75 % des prescriptions de benzodiazépines sont réalisées par les médecins généralistes.
Philippe Vella, directeur médical de l’ANSM, rappelle l’ampleur du problème : « 40 % des patients traités, soit 3,6 millions de personnes, le sont sur des durées trop longues, non conformes aux recommandations ». Et il met en garde : « Or cet usage prolongé favorise les effets indésirables liés à la prise de ces médicaments ».
Les dangers d’une consommation prolongée
Prendre des benzodiazépines au-delà de la durée recommandée n’est pas sans risque. Ces molécules, qui agissent directement sur le système nerveux central, peuvent provoquer :
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Des troubles de la mémoire
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Des étourdissements
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Une somnolence importante
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Des troubles de l’équilibre, particulièrement dangereux chez les personnes âgées
Une mesure phare : réduire la taille des boîtes
Pour freiner les abus, l’ANSM a demandé aux laboratoires pharmaceutiques de proposer des conditionnements plus petits pour les benzodiazépines hypnotiques. L’objectif est de limiter les traitements prolongés sans suivi médical.