La douleur chronique touche près d’un tiers des Français adultes et représente un enjeu majeur de santé publique. Alors que plusieurs traitements sont proposés pour soulager ces souffrances persistantes, une récente étude scientifique remet en question l’efficacité du Tramadol, analgésique opioïde largement prescrit. Les conclusions sont préoccupantes tant sur le plan thérapeutique que sur celui des effets indésirables potentiels.
La douleur chronique en France : un fléau méconnu
Environ 30% des adultes en France sont concernés par la douleur chronique, soit près de 20 millions de personnes qui souffrent quotidiennement pendant plus de trois mois consécutifs. Ces douleurs prennent diverses formes, affectant profondément la qualité de vie des patients.
Parmi les types de douleurs les plus fréquemment rapportés figurent les douleurs articulaires, neuropathiques, les migraines chroniques et les troubles intestinaux persistants. Face à cette souffrance, les médecins prescrivent souvent des antalgiques de palier 2, dont le Tramadol.
Étude danoise : le Tramadol à peine plus efficace qu’un placebo
Une étude d’envergure menée au Danemark et publiée dans le British Medical Journal Evidence-based Medicine le 7 octobre 2025 vient bouleverser les certitudes sur ce médicament.
Les chercheurs ont constitué un échantillon de 6 500 personnes
réparties en quatre groupes distincts selon leur pathologie :
– Patients souffrant de douleurs neuropathiques
– Personnes atteintes d’arthrose
– Patients présentant des douleurs lombaires chroniques
– Personnes diagnostiquées avec une fibromyalgie
Des résultats peu convaincants
Chaque groupe a reçu soit du Tramadol, soit un placebo. Les conclusions sont éloquentes : seulement 48% des patients sous Tramadol ont constaté une diminution significative de leur douleur, contre 41% pour ceux ayant reçu un simple placebo.
Cette différence minime de 7% entre le médicament et le placebo soulève de sérieuses interrogations quant au rapport bénéfice-risque du Tramadol pour le traitement des douleurs chroniques.
Des effets secondaires préoccupants
Au-delà de son efficacité limitée, l’étude met en lumière des effets indésirables potentiellement graves chez les patients traités par Tramadol.
Risques cardiovasculaires et oncologiques
Les chercheurs ont observé une incidence plus élevée de maladies cardiovasculaires chez les patients sous Tramadol par rapport au groupe placebo. Plus inquiétant encore, le développement de tumeurs touchant la thyroïde, le sein et la prostate s’est révélé plus fréquent chez les personnes traitées avec cette molécule.
Effets indésirables quotidiens
Les participants sous Tramadol ont également rapporté davantage d’effets secondaires courants mais handicapants au quotidien : nausées, vertiges, constipation et somnolence figurent parmi les désagréments les plus fréquemment cités.
Le risque d’addiction : un témoignage alarmant
La dépendance représente l’un des dangers majeurs liés à l’utilisation prolongée du Tramadol. En mai 2025, Diane Wattrelos partageait son expérience difficile dans une interview pour le magazine Top Santé.
« Le Tramadol est le médicament antidouleur qui provoque le plus de décès par surdose selon l’enquête annuelle d’Addictovigilance », rappelait-elle.
Souffrant d’algie vasculaire de la face, cette patiente a pris du Tramadol pendant plus d’une décennie avant de faire face à une addiction sévère dont le sevrage s’est avéré extrêmement difficile.
Réaction des autorités sanitaires
Face à ces constats préoccupants, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a pris des mesures concrètes. En février 2025, l’instance a décidé de limiter la durée maximale de prescription des opioïdes à trois mois seulement, afin de réduire les risques d’addiction et d’effets secondaires graves.
Cette décision s’inscrit dans une démarche plus large de contrôle des médicaments opioïdes, dont l’usage problématique est désormais considéré comme un enjeu de santé publique majeur.


